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Vaccination Covid-19 : En route vers l’obligation vaccinale ?
Covid-19, variants, vaccination, restrictions sanitaires font surement parties des expressions que vous entendez le plus régulièrement ces derniers temps. La question qui brûle particulièrement les lèvres actuellement est la suivante : Dirigeons-nous vers une obligation vaccinale contre la Covid-19 ? Le président de la République française semble avoir apporter une réponse à cette question lors de son allocution du 12 juillet 2021. Legalissimo vous dit tout !
Sur l’obligation vaccinale contre la Covid-19 :
Afin d’appréhender efficacement la politique sanitaire se mettant en place actuellement, il est nécessaire de nous pencher sur différents aspects factuels de cette dernière. En particulier, et afin de s’interroger valablement sur l’obligation vaccinale, il convient de s’intéresser aux affirmations de nos dirigeants d’une part, ainsi qu’aux différents mécanismes effectivement mis en place d’autre part.
Qu’a-t-il été affirmé par nos dirigeants ?
En matière de vaccination, la stratégie adoptée par nos dirigeants semblent avoir évolué depuis le début de l’année 2021.
Avant l’allocution du Président le 12 juillet 2021 : « Convaincre plutôt que contraindre »
En effet, depuis le lancement de la campagne de vaccination le mot d’ordre était le suivant : convaincre plutôt que contraindre. En ce sens, le chef d’Etat français avait déclaré fin 2020 qu’il ne rendrait pas le vaccin obligatoire.
Je l’ai dit, je le répète : le vaccin ne sera pas obligatoire. Ayons confiance en nos chercheurs et médecins. Nous sommes le pays des Lumières et de Pasteur, la raison et la science doivent nous guider.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) December 27, 2020
Propos qu’il avait pu confirmer lors de ses différentes prises de parole télévisuelles.
« Et je veux aussi être clair, je ne rendrai pas la vaccination obligatoire » ?#Macron20h #Macron #PasseSanitaire #VaccinObligatoire ? pic.twitter.com/sjuys9CIvH
— Yes We Clown (@yesweclown) July 12, 2021
De même, le 13 janvier, le Ministre des Solidarités et de la Santé avait fait part de l’intention du gouvernement de ne pas recourir au passe sanitaire.
Olivier Véran le 13 janvier : "Le gouvernement a fait savoir son intention de ne pas recourir au #PasseSanitaire"
7 mois plus tard le #PassSanitaire sera désormais obligatoire pour accéder aux cafés, restaurants, centre commerciaux, hôpitaux, avions, trains et cars… #Macron20h pic.twitter.com/7cpAnklxMz
— Anonyme Citoyen (@AnonymeCitoyen) July 12, 2021
La position de l’exécutif vis à vis de l’obligation vaccinale s’est pourtant mue au fil des mois. Ainsi, les questionnements autour du passe sanitaire et de l’obligation vaccinale, jusque là inenvisageables se sont développés progressivement.
Le secrétaire d’Etat au Ministère de la Santé déclarait, le 25 mai, à propos du déploiement du passe sanitaire, que ce dernier se verrait circonscrit à des évènements particuliers dans lesquels on attendrait un public conséquent.
Anonyme Citoyen, [Jul 12, 2021 at 21:07]
Voilà ce que disait Adrien Taquet, secrétaire d'État au Ministère de la Santé le 25 mai.« Le Pass Sanitaire sera réservé aux grands événements, en aucun cas pour aller dans un commerce alimentaire ou dans un restaurant » pic.twitter.com/FQSSg1h0zN
— Lionel (@lionelwwk) July 12, 2021
La position de l’exécutif a alors évolué au fil des semaines jusqu’à l’allocution du Président le 12 juillet 2021, allocution qui marqua un véritable tournant pour la politique sanitaire.
L’allocution du 12 juillet 2021 : un tournant en matière d’obligation vaccinale
« Un été de mobilisation pour la vaccination, voilà ce que nous devons viser : vacciner un maximum de personnes partout, à tout moment » : dans une allocution télévisée prononcée lundi 12 juillet à 20 heures, Emmanuel Macron a insisté sur l’importance de la vaccination pour sortir de la crise sanitaire.
A ce titre, le chef d’Etat a confirmé l’obligation vaccinale pour les soignants, les aidants ainsi que toute profession en contact avec des publics fragiles. Cela représente pas moins de 70 professions. Notons d’ailleurs que policiers et gendarmes ne sont pas concernés par ces mesures.
Le président de la République a par ailleurs annoncé l’extension du passe sanitaire aux bars, restaurants et trains dès le mois d’août et la fin de la gratuité des tests PCR à l’automne.
Obligation vaccinale pour les soignants et les aidants
Les personnes concernées par l’obligation vaccinale « auront jusqu’au 15 septembre pour se faire vacciner ». Après cette date seront mis en œuvre « des contrôles et des sanctions ». Les soignants non vaccinés au 15 septembre « ne pourront plus travailler et ne seront plus payés », a ensuite précisé le ministre de la santé, Olivier Véran.
L’Assemblée Nationale doit examiner le projet de loi fixant cette obligation à partir du 20 juillet pour une adoption définitive avant la fin du mois.
Concernant le reste de la population, « en fonction de l’évolution de la situation, nous devrons sans doute nous poser la question de la vaccination obligatoire pour tous les Français, a déclaré Emmanuel Macron. Mais je fais le choix de la confiance et j’appelle solennellement tous nos concitoyens non vaccinés à aller se faire vacciner dès aujourd’hui au plus vite. »
Début août : extension du passe sanitaire aux bars, restaurants, trains, centres commerciaux etc.
Le passe sanitaire s’étendra sur tout le territoire pour les « lieux de loisirs et de culture » rassemblant plus de 50 personnes dès le 21 juillet. Dès le début du mois d’août, ce passe sera également nécessaire pour entrer dans les bars, restaurants, centres commerciaux trains, avions, hôpitaux et dans les Ehpad.
Pour les restaurants, le non-respect de l’exigence du passe sanitaire conduira à des sanctions pouvant aller jusqu’à la fermeture de l’établissement, une amende de 45 000 € et une peine d’emprisonnement d’une durée d’un an.
Accélération de la vaccination et campagnes de rappel à partir de la rentrée et fin de la gratuité des tests à l’automne
Des campagnes de vaccination spécifiques auront lieu dans les établissements scolaires dès la rentrée, dans l’optique d’accélérer la vaccination des jeunes. Celle-ci étant déjà ouverte à tous les enfants de 12 ans et plus depuis mi-juin.
Une campagne de rappel à compter de début septembre est également prévue pour les personnes vaccinées entre janvier et février. A ce propos, le président a déclaré que pour « ceux qui, vaccinés les premiers, c’est-à-dire en janvier et février, verront prochainement leur taux d’anticorps baisser, dès la rentrée, une campagne de rappel sera mise en place pour vous permettre de bénéficier d’une nouvelle injection ».
Enfin, les tests PCR et antigéniques deviendront payants à l’automne, sauf prescription médicale, a annoncé le président de la République, « afin d’encourager la vaccination plutôt que la multiplication des tests ». Nous ne connaissons pas encore la date précise de la mise en place de cette mesure.
Les contrôles aux frontières renforcés
Les contrôles aux frontières se verront, quant à eux, renforcés « dès cette semaine (…) pour les ressortissants en provenance des pays à risque, avec un isolement contraint pour les voyageurs non vaccinés », a fait savoir le chef de l’Etat.
A l’issue de ce discours, le Président résuma son allocution dans une série de tweet dont le suivant :
Notre choix est simple : faire porter les restrictions sur les non-vaccinés plutôt que sur tous.
C’est le sens du pass sanitaire qui sera étendu. pic.twitter.com/Bk21ncGhNz— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) July 12, 2021
Qu’a-t-il été mis en place ?
A la suite de ces annonces, la mise en place d’une obligation vaccinale semble se dessiner. Ainsi, au delà de ces déclarations, il convient de s’intéresser aux dispositifs effectivement déployés et qui permettraient ou faciliteraient la mise en place d’une telle obligation.
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La mise en place de systèmes QR Code et d’applications spécifiques pour vérifier la vaccination contre la Covid-19
A ce propos, le décret du 21 février 2021 permettant la mise en place de QR code dans les lieux recevant du public semble assez parlant. Initialement envisagé afin d’organiser un traitement des données en lien avec l’application AntiCovid, un tel mécanisme apparait aujourd’hui comme parfaitement adapté au contrôle sanitaire. En effet, le caractère informatisé des données, présumant de fait leur véracité, permettra une grande simplification des vérifications.
De plus, le déploiement récent de l’application TousAntiCovidVerif confirme cette volonté de contrôle. Effectivement, cette application permet de contrôler la validité d’un passe sanitaire en moins d’une seconde. C’est cet outil numérique que les lieux de loisirs et de culture devront utiliser pour filtrer les entrées dès le 21 juillet. Ce dispositif s’étendra ensuite aux cafés, restaurants et centres commerciaux à partir de début août.
TousAntiCovidVerif lit aussi bien le QR code du passe sanitaire français que celui du certificat européen affichés sur smartphone ou sur papier.
Une telle application ne pourra cependant pas vérifier la vaccination en tant que telle. En effet, le résultat du scan fera simplement mention de la validité ou non du passe sanitaire de l’individu. Cette information seule ne permettra donc pas de déterminer si l’individu est vacciné ou s’il s’est simplement fait tester récemment.
Des contrôles sanitaires renforcés à plusieurs niveaux
Nous remarquons aussi un renforcement des contrôles et ce, à plusieurs niveaux. A ce titre, nous pouvons notamment citer le décret n° 2021-724 du 7 juin 2021 qui détaille la mise en application de ces contrôles. Ce décret donne ainsi la liste des personnes habilitées à vérifier les passes sanitaires :
Sont autorisés à contrôler ces justificatifs (…) : Les exploitants de services de transport de voyageurs ; Les personnes chargées du contrôle sanitaire aux frontières ; Les responsables des lieux et établissements ou les organisateurs des évènements dont l’accès est subordonné à leur présentation en application du présent décret ; Les agents de contrôle habilités à constater les infractions prévues à l’article L. 3136-1 du code de la santé publique.
Les deux premiers correspondent aux situations de voyage. Les employés de compagnies aériennes ont par exemple le droit de vérifier votre passe sanitaire.
La dernière catégorie de personnes autorisées à contrôler le passe sanitaire, en revanche, questionne la Cnil. Dans le même avis du 8 juin, on peut lire : « la Commission s’interroge sur les raisons pour lesquelles des agents de contrôles, habilités à constater les infractions relatives au passe sanitaire, devraient pouvoir être également habilités à contrôler les justificatifs pour autoriser, en dehors de leur mission de police judiciaire, les déplacements ou l’accès aux lieux, établissements et événements concernés par le passe sanitaire. »
Notons de surcroît que ces mesures actuellement en œuvre, ainsi que la liste des personnes habilitées à effectuer de tels contrôles, feront l’objet d’un élargissement à partir du 21 juillet en application des nouvelles mesures annoncées par le Président. Ces élargissements favoriseraient alors le déploiement d’une obligation vaccinale généralisée.
L’obligation vaccinale contre la Covid-19 est-elle envisageable ?
Plusieurs facteurs semblent alors indiquer la tendance à la mise en place, sous peu, d’une obligation vaccinale. L’obligation vaccinale qui se dessine actuellement prend différentes formes. En effet, cette obligation semble désormais se mouvoir à plusieurs sur plusieurs plans, que ce soit au niveau juridique, économique ou même sociale.
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L’obligation vaccinale par la voie juridique
Une telle obligation interviendra alors initialement par la voie juridique, par la voie législative particulièrement. En ce sens, une loi devrait être élaborée puis votée le 21 juillet afin de formaliser juridiquement les mesures annoncées par le Président ce 12 juillet.
On y retrouvera notamment la matérialisation de l’obligation vaccinales pour les profession en contact avec des publics fragiles.
De plus, cette loi devrait concrétiser l’utilisation générale du passe sanitaire. En effet, l’article 1er de l’avant projet de loi prévoit d’étendre l’usage du passe sanitaire pour « les activités de loisirs », comme les cinémas et salles de spectacles, « les activités de restauration ou de débit de boissons », les « déplacements de longue distance par transport public », soit les TGV et intercités, « les foires ou salons professionnels », « les grands établissements et centres commerciaux » ou encore « les services et établissement accueillant des personnes vulnérables, sauf en cas d’urgence ».
Cette nouvelle réglementation s’accompagne par ailleurs de lourdes sanctions. Ces sanctions pénales pourront aller jusqu’à 6 mois de prison et 10.000 euros d’amende pour les clients sans passe sanitaire. Les responsables des établissements qui ne contrôleraient pas le passe sanitaire seront, quant à eux, passible d’un an de prison et de 45.000 euros d’amende.
Concernant la définition même du passe sanitaire, celui-ci sera attesté par « la présentation soit du résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, soit d’un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19, soit d’un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination par la covid-19« .
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Une obligation vaccinale renforcée par des contraintes économiques
Ainsi, le passe sanitaire ne se caractérisera pas exclusivement par la vaccination. Cependant, cette dernière méthode reste la moins contraignante à bien des égards. Effectivement; mis à part les cas anecdotiques de présentation d’un certificat de rétablissement suite à une contamination; la seule option demeurante aux personnes ne souhaitant pas se faire vacciner consistera en la production d’une multitude de tests réguliers afin de prouver leur non-contamination à la Covid-19.
On remarque alors le caractère contraignant de devoir effectuer un dépistage toutes les 72h afin de pouvoir circuler normalement. Outre cela, cette méthode va peser d’autant plus sur les citoyens que les tests de dépistage deviendront payants à l’automne. Ce caractère payant ne concernera toutefois que les tests dits « de confort« . Cette appellation désigne tous les tests effectués à l’exception de ceux faisant suite à une prescription médicale.
La non-vaccination risque donc de représenter une charge économique considérable pour les récalcitrants. Ces derniers se verront alors contraints de supporter très régulièrement des surcoûts afin de pouvoir jouir de leurs libertés.
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Obligation vaccinale et pression sociale
Enfin, ce sentiment de contrainte à la vaccination semble se voir renforcer par une certaine pression sociale. A ce titre nous pouvons notamment évoquer le débat public autour de la question de la vaccination. Cette dernière semble avoir provoquer un clivage de l’opinion publique.
Il apparait de plus en plus compliqué d’organiser et d’alimenter un débat sain sur la question. La question ne portant non pas sur le principe de la vaccination mais sur son caractère obligatoire.
De même, pour de nombreux citoyens, il en va de leur avenir professionnel. Ainsi, un exemple de cette pression sociale a pu s’illustrer lors des annonces d’Olivier Véran. Ces mesures; indiquant qu’après le 15 septembre les personnels concernés par l’obligation vaccinale ne pourront plus ni travailler ni percevoir un salaire; combinées à la mise en œuvre de contrôles et de sanctions; caractérise la pression effectuée sur ces professions.
Cela concerne aussi de nombreux étudiants/apprenants notamment dans le secteur de la santé et du social. En effet, certains organismes de formation ont annoncé à leurs étudiants l’obligation de devoir se faire vacciner. Cette obligation conditionnerait alors la poursuite de leur formation à la rentrée prochaine.
A cela, s’accompagne une culpabilisation des non-vaccinés qui se voient parfois désignés comme responsables de l’enlisement de la crise sanitaire. A ce titre le Président a formulé le choix « (…) de faire porter les restrictions sur les non-vaccinés plutôt que sur tous« .
L’ensemble de ces éléments mis bout à bout permettent alors de considérer la mise en place progressive d’une obligation vaccinale. Cette obligation étant d’ores et déjà assumée concernant certaines professions et souhaitée par une partie de la population. Reste à savoir de quelle manière cette situation évoluera.