Actualités
Violences à Dijon: que risquent-ils ?
Depuis vendredi dernier, Dijon a comme des airs de « Chicago ». Les habitants assistent à des scènes à peine croyables. En effet, des hommes cagoulés, équipés d’armes blanches et d’armes de poings font de la ville un terrain d’affrontement depuis maintenant quatre jours. Cette « quasi-guérilla » urbaine concerne des individus d’origine tchétchène et des individus d’origine maghrébine. Les réseaux sociaux ont joué un rôle de relais d’information dans les affrontements. De nombreuses images, vidéos et témoignages sont publiés sur twitter et Instagram.
Legalissimo vous propose de revenir sur ces violences qui ont marqué la ville de Dijon et d’en connaitre les conséquences sur le plan pénal.
Les mêmes qui se cachaient derrière la police quand les Tchétchènes étaient dans le coin.
D’ailleurs, où sont journalistes et LDH qui taxeront les policiers d’oppresseurs de la jeunesse une fois que NOUS aurons rétabli la paix ? Z’ont pas peur quand même ? Allez viendez ! #Dijon pic.twitter.com/7Dqoj7HU4Z— Linda Kebbab (@LindaKebbab) June 16, 2020
Les affrontements: de quoi et de qui s’agit-il ?
Des tensions communautaires et des règlements de compte seraient à l’origine des conflits entre bandes rivales sur fond de trafic de drogue.
Tout commence vendredi dernier lorsqu’une quarantaine d’individus d’origine tchétchènes se rendent dans un bar pour en découdre. Ils sont venus pour « venger » l’humiliation d’un des leurs. Ils ont saccagé le bar à l’aide de battes de baseball, barres de fer et d’armes à feu. Pour le camp adverse, il s’agit d’une agression sur leur « territoire ». Ils ont donc pris les armes pour défendre leur position dans le quartier des grésilles.
S’en suit l’ouverture de deux enquêtes sur la base des éléments de preuves réunis:
- La première concerne les tentatives d’homicide volontaire et vise les tchétchènes.
- La seconde concerne les hommes cagoulés exhibant avec ostentation des armes lourdes.
Dijon: L’inaction des pouvoirs publics face aux violences
Ensuite, la multiplication des violences et l’absence d’intervention de la police a entraîné des réactions en cascade de la part de personnages syndicaux et politiques.
La syndicaliste de police Linda Kebbab dénonce le manque de moyens de la police dans les quartiers sensibles.
Les riverains dénoncent l’absence d’intervention du préfet durant les trois premiers jours.
Laurent Nunez, secrétaire d’état au ministère de l’intérieur a réagi et a promis le renfort de 150 gendarmes pour mettre fin à cette guerre de gang.
Au sommet de l’état, c’est Emmanuel Macron qui a proposé d’expulser les nombreux réfugiés tchétchènes parmi ceux interpellés. Une annonce sensationnelle, qui intervient dans un contexte de tensions policières.
Des années… que nous alertons sur nos interventions sans soutien ni moyens dans des quartiers que l’Etat a abandonné. Et qu’on nous traite de menteurs et de brutes.
Ce n’est que #Dijon. Imaginez maintenant le stock d’armes dans les grandes agglomérations françaises… pic.twitter.com/IP6lyJLfg0— Linda Kebbab (@LindaKebbab) June 16, 2020
Infractions de violences: Que risquent-ils ?
Enfin, les individus sont éligibles à plusieurs infractions sur le plan pénal.
Les infractions en lien direct avec les violences:
- Le port illégal d’arme. En France, la réglementation est stricte. Le code pénal précise que le port illégal d’arme fait encourir à son auteur jusqu’à 10 ans de prison et entre 750€ et 500 000€ d’amende. Le travail de la police judiciaire consistera à faire état des armes aperçues sur les vidéos, et à vérifier si les armes à feu ne sont pas factices. Intervient ensuite la recherche et l’identification des porteurs d’armes.
- L’incitation à l’émeute. Le droit français ne reconnait pas explicitement ce terme. Mais l’article 433-10 du code pénal réprime la » provocation directe à la rébellion, manifestée soit par des cris ou des discours publics, soit par des écrits affichés ou distribués, soit par tout autre moyen de transmission de l’écrit, de la parole ou de l’image de deux mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende. »
L’alinéa 2 précise que « lorsque le délit prévu à l’alinéa précédent est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. » En effet, les réseaux sociaux regorgent de preuves, caractérisant des appels à la violence et au désordre public. Établir un lien de causalité juridique ne sera pas difficile. En revanche, les auteurs de ces actes paraissent difficilement identifiables. Beaucoup d’entre eux portaient des cagoules au moment des faits.
- Violences en réunion. Prévus aux articles 222-7 et suivants du code pénal, les violences volontaires sont réprimés de sanctions plus ou moins sévères selon les cas d’espèces, leur résultat et leur gravité. Ainsi, l’infraction peut aller de la simple contravention au crime. Les sanctions sont aggravées en fonction de la gravité des blessures infligées à la victime. En l’espèce, plusieurs agressions physiques avec arme blanche sont visibles sur les vidéos.
Les infractions indirectes liés à l’ordre public:
- Mise en danger de la vie d’autrui. Les affrontements ont eu lieu sur la voie publique. Une voiture a foncé sur les contrevenants et a fini retournée sur la route. En parallèle, les risques pour les usagers de la voirie sont réels. Ils exposent directement les habitants à des blessures voir à une mort potentielle.
- Destruction du mobilier urbain. Les contrevenants ont cassé plusieurs caméras de surveillance installées sur la voie publique. Ils ont aussi mis le feu à des poubelles et à des véhicules. L’article 322-1 du code pénal dispose à ce titre que « La destruction, la dégradation ou la détérioration d’un bien appartenant à autrui est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende, sauf s’il n’en est résulté qu’un dommage léger« . Or, les dégâts sont extrêmement lourds.
- Trouble à l’ordre public. En France, le ministère de l’intérieur se charge de garantir l’ordre public. Toutefois, les premiers jours d’émeutes ont été marqués par l’absence totale d’intervention des forces de l’ordre. La responsabilité administrative peut être engagée à ce titre. Responsabilité qui se retournera aussi sans doute vers les contrevenants.