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Steam, la plateforme de jeux vidéo dans un royaume trop libéral.

Steam, la plateforme de distribution de jeux vidéo de Valve, est au cœur d’un débat sur la responsabilité juridique des plateformes numériques face à des contenus extrêmes. Avec plus de 20 millions d’utilisateurs quotidiens, Steam soulève des questions cruciales concernant la régulation et la liberté d’expression dans le secteur du jeu vidéo.
Responsabilité juridique et contenus extrêmes
La législation actuelle encadre la responsabilité des plateformes numériques, notamment à travers la directive européenne 2000/31/CE sur le commerce électronique et la loi pour la Confiance dans l’Économie Numérique (LCEN) de 2004. Ces textes définissent deux statuts : l’hébergeur, qui stocke des contenus sans intervenir dans leur création, et l’éditeur, qui est responsable du contenu qu’il diffuse. L’article 6-I-2 de la LCEN précise que la responsabilité de l’hébergeur n’est engagée que s’il a connaissance d’un contenu illicite et ne prend pas les mesures nécessaires pour le retirer.
La jurisprudence, comme dans l’affaire L’Oréal c. eBay, a établi que l’intervention active d’une plateforme peut modifier son statut, la rendant responsable en tant qu’éditeur. De plus, le Digital Services Act (DSA), en vigueur depuis février 2024, impose des obligations accrues, notamment pour les Very Large Online Platforms (VLOP), bien que Steam ne dépasse pas le seuil de 45 millions d’utilisateurs mensuels dans l’Union européenne.
Steam Direct et Steam Community : une zone grise
Steam ne se limite pas à être un simple hébergeur. Avec Steam Direct, tout développeur peut publier un jeu moyennant un paiement de 100 dollars, sans contrôle narratif ou idéologique. Bien que cela puisse sembler indiquer un rôle d’hébergeur passif, la mise en avant de certains titres et la commission de 30 % sur les ventes montrent que Steam agit également comme un éditeur. Des jeux tels que Squad 22: ZOV et Six Days in Fallujah illustrent cette ambiguïté, car ils contiennent des contenus violents ou propagandistes sans intervention préventive de la plateforme.
Par ailleurs, Steam Community permet aux utilisateurs de partager des avis et des contenus, ce qui place Valve sous le régime de l’hébergeur. Cependant, la loi exige un dispositif de signalement efficace et une réactivité face aux contenus illicites. Or, Steam est critiqué pour son manque de transparence et son approche majoritairement réactive en matière de modération.
Vers un avenir incertain
Avec l’expansion continue de Steam et son rôle croissant dans l’industrie vidéoludique, la question de sa responsabilité devient de plus en plus complexe. La plateforme doit naviguer entre la liberté éditoriale et les obligations légales imposées par le DSA. Ce dilemme soulève des interrogations sur la manière de concilier innovation, liberté d’expression et protection contre les contenus extrêmes. La régulation de Steam pourrait bien définir l’avenir du jeu vidéo dans un monde numérique en constante évolution.





