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Amiante : le préjudice d’anxiété s’ouvre à tous les salariés


C’est lors de la décision du 11 mai 2010 que la Cour de cassation a officiellement reconnu le préjudice d’anxiété amiante (Cass. soc., n° 09-42.241).

Préjudice d’anxiété amiante : une reconnaissance jusqu’ici limitée

Ce préjudice se définit comme le fait pour les salariés d’avoir travaillé « dans une situation d’inquiétude permanente face au risque de déclaration, à tout moment, d’une maladie liée à l’amiante » et étant « amenés à subir des examens réguliers propres à réactiver cette angoisse ».

Ce préjudice se limitait toutefois aux seuls salariés bénéficiant du régime particulier de préretraite amiante et ayant exercé dans l’un des établissements listés par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998.

L’article 41 fait état des conditions à remplir pour bénéficier des dispositifs de préretraite amiante et du versement de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA). Il vise les activités professionnelles particulièrement exposées (établissements de fabrication de matériaux contenant de l’amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l’amiante ou de construction et de réparation navales). Un arrêté ministériel dresse la liste des établissements concernés et des annexes précisent régulièrement les nouveaux postes concernés.

Depuis une décision de 2014, la Cour de cassation est allée encore plus loin en permettant une reconnaissance automatique du préjudice d’anxiété (sans même avoir à le prouver) dès lors que les conditions de l’article 41 sont remplies. Les bénéficiaires du dispositif de préretraite amiante n’ont donc plus à prouver le préjudice d’anxiété.

Toutefois, face à la multiplication des contentieux des salariés non bénéficiaires de l’ACAATA, les juges ont dû adapter leur position.

Lire aussi – Remise en cause des barèmes des indemnités de licenciement

Une possibilité désormais ouverte à tous les salariés

Dans cette affaire, un salarié employé par EDF en qualité de rondier, chaudronnier et technicien, au sein de la centrale de Saint-Ouen a saisi le conseil de prud’hommes afin de demander réparation du préjudice d’anxiété subi compte tenu de son exposition à l’inhalation de fibres d’amiante et pour manquement de son employeur à son obligation de sécurité de résultat. La société EDF espérait échapper à toute condamnation en soulevant que le salarié ne bénéficiait pas de l’ACAATA (Allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante) et n’avait pas travaillé au sein d’un établissement listé par l’arrêté ministériel.

Opérant un revirement jurisprudentiel majeur, la Cour de cassation donne raison au salarié et abandonne en partie les conditions qu’elle avait elle-même posées. Elle motive cette décision par le développement de ce contentieux et par les nombreux salariés exposés à l’amiante bien que ne bénéficiant pas des régimes spécifiques de préretraite amiante.

Elle précise ainsi « qu’il apparaît toutefois, à travers le développement de ce contentieux, que de nombreux salariés, qui ne remplissent pas les conditions prévues par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée ou dont l’employeur n’est pas inscrit sur la liste fixée par arrêté ministériel, ont pu être exposés à l’inhalation de poussières d’amiante dans des conditions de nature à compromettre gravement leur santé ».

Elle admet « que le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée ».

La Cour de cassation élargit ainsi la possibilité à tous les salariés exposés d’être indemnisés du préjudice d’anxiété. A charge cependant pour ces salariés de prouver non seulement l’exposition à l’amiante mais surtout de rapporter la preuve que leur employeur n’a pas pris toutes les précautions nécessaires permettant de les protéger contre ce risque. Il subsiste encore à ce jour une distinction entre les différents salariés exposés.

Cour de cassation, assemblée plénière, 5 avril 2019, n° 18-17.442 (le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave peut être admis à agir contre son employeur quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998)

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